Arrivée à Ruatho
Je
m'appelle Moreta. Moreta Orlithe. Depuis ma tombe où je gis désormais, je vais
vous raconter une très longue histoire. L'histoire de ma famille… Ma famille, que
dis-je ? De mon clan ! De la force que j'ai implanté à Ruatho en m'y
installant, fécondant cette vallée stérile de ma descendance…
Quand est
venue ma majorité, ma maman, la pauvre Lili, n'était plus de ce monde, rongée
par l'amertume d'avoir passé son existence dans l'ombre de ce grand homme
qu'elle avait tellement aimé, il y a si longtemps.
Un jour,
Père est venu me trouver et m'a clairement signifié qu'en temps qu'unique
héritière, il était temps que je prenne ma place à sa droite, et que j'apprenne
le métier.
Une scène
terrible a suivi cette annonce. J'ai pleuré de rage, j'ai crié, j'ai supplié…
Rien à faire. Père est resté inflexible, emmuré dans son armure d'indifférence.
Il se moque que je pleure encore maman. Il se moque de savoir si ça m'intéresse
ou pas de faire ce que lui veut que je fasse.
Maman m'avait
donné le titre de propriété il y a quelques années. Ces terres sont dans sa
famille depuis longtemps, mais personne n'en a jamais rien fait. Et bien, je
crois que je vais en faire quelque chose, moi ! Bien sur, j'ai peu d'argent en
poche, 4800 simflouzes, c'est peu, mais je devrais pouvoir au moins me faire
construire un toit sous lequel dormir.
Et surtout,
accomplir la destinée de maman, en même temps que faire un sacré pied de nez à
mon père (qui a récemment réussi à trouver un fils illégitime à former… Tiens
donc, il avait quand même le temps de s'offrir des aventures!). J'ai repris le
nom de maman, n'ayant que peu de choses en commun avec l'autre, et je compte
bien répandre ce nom à Ruatho. Je compte bien aussi arriver à construire moi
aussi un empire pour contrer Père… après tout, j'ai bien appris quelques
ficelles du métier, en le voyant faire !!
J'ai réussi à trouver quelques meubles pas trop usagés dans le centre ville. Au passage, c'est à peu près tout ce qu'il y a ici : un ridicule petit centre-ville, avec quelques boutiques, et des autochtones… Tiens, à propos d'autochtones, on ne peut pas dire qu'ils soient farouches ! Hier soir, j'en avais 4 dans la maison… Tous en train de se battre pour aller aux toilettes, bien évidemment ! Misère, si seulement j'avais eu les sous pour faire un seul mur supplémentaire !! Mais maintenant, je n'ai plus que 30 $ en poche, pas moyen de faire la moindre dépense (heureusement, dans cette ville, lorsqu'on vous vend un frigo, il est déjà rempli… Etrange, mais pratique!). Il faut rapidement que je trouve un travail. Certes, il sera alimentaire mais bon, il faut bien commencer quelque part !
J
Pour le
boulot, je suis agent de sécurité dans la supérette du coin… Bonjour tous les
mecs qui passent en me reluquant !
Moi-même,
je n'aurais pas dit que j'ai le profil de l'emploi, il faut des biscottos et…
heu… des biscottos. Il va falloir faire un peu de gym, histoire de leur montrer
que je suis capable de maîtriser un dangereux voleur de poulet surgelé… Et
rabattre son caquet au directeur de la supérette qui ne m'a pas caché qu'il
m'embauchait "faute d'autres candidat". Humpf !! Il arrivait à peine à
cacher un rictus méprisant.
Pour l'ami,
il s'appelle Florian et il a l'air de se sentir déjà parfaitement à l'aise chez
moi. Regardez moi ça, je suis en train de partir au boulot et il est déjà en
train de glandouiller sur le lit. J'avoue que je ne le trouve pas désagréable,
ni physiquement ni rien, il est plutôt sympathique, mais ce petit côté sans
gène me dérange un peu.
Enfin seule
! Quand je suis revenue du boulot, Florian partait, mais il n'en a pas moins profité
pour me faire de nombreuses avances, et tenter de mater lorsque je me suis
changée pour faire un peu de sport (et oui, il faut garder la forme si on veut
pouvoir courir après les voleurs de poulet surgelés !). Au moins, il n'a pas
froid aux yeux celui-là !
J'avoue que
mon caractère trouve du répondant chez lui, et ça me fait me sentir plutôt bien
avec lui… Avant de partir, il m'a prise par les épaules et en a profité pour
passer longuement sa main dans mes cheveux. Le prétexte était amical, mais je sais
bien que cette longue tignasse blonde attire les hommes… Mais je ne dis pas que
j'ai trouvé ça désagréable… Je dirais même que ça ne me dérangerait pas qu'il
recommence. Non, ça, pas le moins du monde…
Bon, comme on dit, emballé, c'est pesé ! Il a fallu à Florian de longs mois d'une cour assidue avant qu'il se passe quoi que ce soit. Son côté dragueur me déplaisait considérablement, même si, à côté, son charme ne me laissait pas insensible (mis à part son éternel bermuda à carreaux que j'ai fini par avoir en horreur). Maintenant que je raconte cette histoire, je pourrai résumer notre histoire à : il m'a eue à l'usure !
Mais pas
sans mal pour lui car j'ai posé mes conditions ! Après m'avoir déclaré sa
flamme, une seule chose comptait pour lui : le passage aux… hum… disons…
"choses concrètes de la vie". Ça, pour sur, ceinture ! Je lui ai
clairement dit qu'il n'aurait pas ce qu'il voulait avant qu'on soit au moins
officialisés en tant que couple, et qu'il se soit installé chez moi. Car, pas
question de quitter ma maison et mon terrain, malgré l'inconfort (temporaire de
toute façon) et puis en plus, il habitait encore chez sa mère, alors… toutes
considérations prises pour ma proposition, il s'est absenté 3 heures pour
revenir poser ses valises sur mon perron.
J'ai aussi
eu la bonne idée d'exiger de lui l'ouverture d'un compte commun où il a déposé
toutes ses économies (12 000 $, ça rapporte d'habiter chez maman). Il a bien
tordu le nez quand on a fait les papiers, se sentant de plus en plus la corde
au cou, mais c'était ça où il me perdait. Et, je dois avouer que j'exerce une
certaine attraction sur les hommes (c'est encore les cheveux, ça sûrement!)…
Au début,
on s'entendait très bien, même si je trouvais qu'il me demandait trop souvent
de le rejoindre au lit et puis dans d'autres endroits incongrus, aussi…
Emportés par la fougue de déménagement, et puis peut être par une très vague
envie de la part de Florian d'avoir un chez-lui comme avant chez maman, on
s'est fiancés, puis mariés. Rétrospectivement, je dirai qu'il s'en est mordu
les doigts, il avait troqué sa liberté contre un foyer dans lequel je faisais
le minimum. J'avais intégré l'école des officiers depuis peu, et cette
formation me prenait la majorité de mon temps libre.
Et puis la
vie a pris son train-train et la lassitude s'est installée à une vitesse
fulgurante.
Lui était
cuisinier, (mais n'en préparait pas pour autant les repas à la maison, bien
sûr) et n'avais guère d'ambition. C'est moi qui ai du le pousser, le tirer pour
qu'il monte en grade, et encore, quand je le collais au télescope pour qu'il
travaille un peu son esprit logique (faut bien ça pour faire cuistôt), dès que
je tournais le dos, il ôtait son œil de l'objectif et regardait autour de lui d'un
air particulièrement maussade. Le reste du temps, quand il n'était pas au
travail et que j'en avais marre de le pousser à bosser, il restait devant la
télé en marcel et caleçon (beuh, nous voilà bien loin de sa cour, certes sans
finesse, mais au moins ardente, des premiers temps). Et le peu de discussion
qu'on avait tournait autour du fait de savoir si j'étais disposée ou non à
satisfaire à ses envies…
Et comme je
sais quand même ce que je veux, c'est arrivé (bien sur, Florian n'était pas au
courant, sinon, pensez, il aurait
probablement mis moins d'ardeur à sa participation à ce projet) : je suis
enceinte. Certes, vous me direz, ça n'est peut être pas le bon moment dans ma
vie, mais… c'est plus fort que moi. Je veux donner le jour à un être de mon
sang, qui portera mon nom jusqu'à la prochaine génération (je ne vous ai pas
parlé d'une condition supplémentaire que j'avais posé à Florian ? Il a du
prendre mon nom en m'épousant. A bas les traditions !).
De toute
façon, je patauge un peu dans mon école d'officier, j'ai la sensation que je
n'y arrive pas, peut-être que quelques mois d'éloignement remettront les choses
en place…
Et pour ce
qui est de mon couple… Je suis sure que Florian a des aventures a droite à
gauche, même si je n'en ai aucune preuve. En plus, il ne sait pas trop de quel
bord il est, il ramène où Abdel ou Irène à la maison. C'est dingue ce que ces
gens sont fatigués, je les trouve systématiquement dans le lit quand je rentre
du boulot, avec Florian qui traîne en caleçon dans la cuisine en essayant de
dissimuler son air béat. Mais ça m'importe peu. Le futur amour de ma vie, c'est
mon enfant à naître.
Florian
n'était pas encore au courant, pour notre enfant. Je l'ai gentiment appelé, fait
installer sur le lit, l'air de dire "on va faire un câlin" et puis je
lui ai tout déballé. Il a le droit d'être au courant, et de toute façon, il
s'en apercevra forcément. Je ne peux pas dire que ça se soit bien passé… il a
fini par se lever et par faire les 100 pas dans la chambre, tempêtant contre
"ces bonnes femmes qui n'en font qu'à leur tête". Il a dit des mots
très durs, m'a demandé si j'estimais que je ne l'avais pas suffisamment
enchaîné, qu'il fallait que je rajoute par dessus ça la paternité. Il en a
d'ailleurs émis des doutes sur l'identité du père, m'accusant de toutes sortes
de coucheries diverses avec tout le voisinage.
Cette
dispute a, je crois, marqué le point final de notre mariage. Du moins, de mon
côté. Lui, allez savoir pourquoi, puisqu'il aurait été si bien libre, a tenté
plusieurs fois de recoller les morceaux. Mais ça n'a pas fonctionné. Juste
assez pour que je consente à partager son lit, et ça, seulement pour dormir.
J'étais blessée par ces accusations infondées, d'autant que moi, je le
soupçonnais, lui, d'infidélité.
Malgré
tout, nous ne nous sommes pas séparés. Pour le reste, nous étions un couple qui
fonctionnait, dans la vie. Des amis, de l'argent qui rentrait régulièrement,
oh, pas des cent et des milles, mais suffisamment pour qu'on agrandisse petit à
petit la maison.
Une maison
qui s'agrandissait, mais le nettoyage était toujours pour moi ! Ce soir là, je
m'en souviens encore, je ruminais de très sombres pensées. Je lui en voulais
énormément de me laisser entretenir la maison sans lever le petit doigt, alors
que j'étais enceinte jusqu'aux yeux ! Mais quand je lui avais fait la remarque
plus tôt dans la soirée que la salle de bain était crade, ainsi que la cuisine,
que notre chambre était en bazar et que la chambre du petit, récemment
construite, était encore pleine de plâtre et de copeaux de tapisserie, il
m'avait répondu d'un ton acide que puisque j'avais voulu cet enfant, il fallait
que j'assume jusqu'au bout. Il n'allait pas nettoyer plus qu'avant sous
prétexte que je m'essoufflais facilement.
J'ai honte
de ces pensées et de ces projets qui m'ont traversé l'esprit, mais la rage
m'habitait tandis que je récurais la douche. J'imaginais mille façon de le
faire souffrir, ou de la faire disparaître da ma vie, étant donné qu'il n'était
plus qu'un poids pour moi. Mais bien sur, je n'ai rien fait. On ne se
débarrasse pas des gens comme ça malheureusement. Et puis il pouvait m'être
utile, car il briguait actuellement un poste qui lui permettrait de nous ramener
à la maison une machine industrielle à chocolat, machine qui nous arrondirait
confortablement les fins de mois.
Ma
grossesse ne s'est donc pas passée sans mal. Florian et moi étions
désespérément en froid… Je ne voulais même plus partager son lit et lui, en
mufle qu'il a toujours été sous ses airs charmeurs, m'a dit : "Le lit,
c'est comme pour le ménage. Tu crois quand même pas que je vais dormir dans le
canapé sous prétexte que Madame ne supporte pas ma présence à côté d'elle ?
Moi, je dors dans le lit, et toi, tu fais bien ce que tu veux".
Ça a au
moins l'unique mérite d'être clair. J'ai donc passé de nombreuses nuits à
essayer de dormir sur ce canapé. Et j'ai fini par aboutir à la conclusion que
j'aurais du choisir un convertible. La plupart du temps, j'essayais de me
retenir de ne pas glisser, pour ne pas finir par terre. Et allez faire ça avec
un ventre de femme enceinte de plus de 7 mois ! J'étais épuisée, même en plein
congé maternité… J'ai donc fini par ravaler mon orgueil et rejoindre Florian au
lit. Mais il ne l'emportera pas au paradis, foi d'Orlithe !
Et voilà…
Après 12 heures en salle de travail (Florian avait fini par m'emmener à la
maternité de mauvaise grâce, mais je crois que mes hurlements de douleur lui
avaient fait peur. Comment aurait-il expliqué la présence d'un cadavre dans
notre maison?), Robinton a rejoint notre famille… Aahh, mon fils premier né.
Quel bonheur ! Il porte mon nom et le transmettra à travers les âges. En plus,
il a mes yeux légèrement en amande, aucun doute, il s'agit donc bien d'un
Orlithe.
Lorsque
nous sommes rentrés de la maternité, j'ai eu comme la sensation que Florian
perdait un tout petit peu les pédales. Pas de doute, lorsque j'étais absente,
monsieur avait du bien en profiter pour faire des galipettes avec tous ses
collègues qu'il nous ramenait du travail. Il avait pris de l'argent sans m'en
parler pour faire construire une cabane dans la jardin, fermée à clé, mais que
je suspectais être sa garçonnière. Voulait-il me tester, me forcer à partir en
lui laissant tout ce que nous avions construit jusqu'ici ? Il amenait
maintenant ses amants et maîtresses sans aucune vergogne sous mon nez, allant
s'enfermer avec eux dans son cabanon.
Peu
m'importait, j'avais Robinton, et mon amour pour Florian s'était fait la malle
depuis belle lurette ! Et en plus, j'avais Jacques… Je ne vous ai pas parlé de
Jacques ?
Jacques est
venu à mon retour de la maternité. Florian avait tellement délaissé la maison
durant mon séjour (j'avais renvoyé la bonne, ne voulant quand même pas lui
laisser des tentations sous le nez) qu'elle était pleine de cafards. Beuark !
C'est pas bon pour mon bébé ni pour moi, ça ! Alors j'appelle la mairie et la secrétaire
me dirige vers une entreprise de désinsectisation locale, que j'ai fait venir.
C'est là
que j'ai connu Jacques. Il est venu nettoyer ma maison de mes cafards, et je ne
pouvais détacher mes yeux de lui. Là aussi, je me suis fais prendre au piège,
mais cette fois par l'amour, l'honnêteté et la gentillesse. Car c'est tout ça
mon Jacques.
Je ne suis
pas partisane de tromper mon mari pour le punir de m'avoir trompée, aussi,
lorsque mes lèvres et celles de Jacques se sont frôlées la première fois,
c'était uniquement par amour. Car je crois que je peux l'avouer. Je suis
désormais amoureuse de Jacques…
Notre
liaison a duré longtemps, s'enrichissant avec le temps. Florian se moquait
totalement de l'éducation de Robinton et continuait à courir les jupons (et les
caleçons également…). Jacques s'est mis à faire de plus en plus en plus partie
de notre vie. Il était là aux anniversaires, pour toutes sortes d'événement
heureux, et faisait partie intégrante de l'environnement de Robinton. Il aimait
mon fils, aussi, comme si c'était le sien, et je crois bien que Robinton
l'appréciait aussi, si je dois en croire le nombre de "Zac ? où Zac ? Veux
Zac !!" que j'ai entendu en élevant mon fils.
Bien
évidemment, Florian a fini par comprendre, au bout d'un certain temps, que je
vivais une aventure avec Jacques. Lui-même continuait à coucher à tout va, mais
subitement, il a pris conscience que je ne lui étais plus fidèle. Et là,
incroyable mais vrai, le drame !
Florian m'a
trouvé blottie dans les bras de Jacques un jour qu'il rentrait du boulot un peu
plus tôt. Je l'avais moi même surpris l'avant veille une fois de plus avec
Abdel, mais sans doute blasée par l'habitude, je n'avais rien dit de spécial.
Mais, Florian, lui, a réagi de façon incroyablement violente. Il a pleuré, m'a
supplié de laisser tomber Jacques, m'a dit des choses que je trouvais
invraisemblables : il ne pouvait pas vivre sans moi, il m'aimait désespérément…
C'était à
n'y rien comprendre ! Cet homme me faisait cocue depuis des années avec tout ce
qui lui passait sous la main (hum!), mais ne supportait pas la réciproque ! Je
suis bien d'accord que ça n'avait rien de moral, mais je ne comprenais pas la
raison d'une telle scène. Après tout, pour moi, la passion du début s'était
éteinte il y longtemps.
Et au
milieu de ses explications entrecoupées de sanglots : j'ai fini par comprendre.
Florian était un authentique cœur d'artichaut. Certes, il avait beaucoup
d'amant, mais il les aimait tous. Et il m'aimait toujours moi… Quelle
révélation ce fut ! Par la suite, j'ai un peu moins vu Jacques et Florian a
tout fait pour recoller les morceaux entre nous. Je dois avouer qu'il m'a même
surprise, avec toutes ces attentions… Tellement que je me suis laissé aller, et
que nous allons avoir un deuxième bébé… Une petite fille qu'on pourrait probablement
qualifier d'enfant de l'amour…
Cette grossesse s'est beaucoup mieux passée que la première, Florian était beaucoup plus présent qu'avant. La "crise Jacques" avait remué un certain nombre de choses dans notre vie. Déjà, Florian avait fini ce livre de recettes asiatiques qu'il avait commencé il y a plusieurs années. L'inspiration lui était revenue, m'a-t-il dit… Quel personnage étrange tout de même. En tout cas, la vente de son livre nous a rapporté beaucoup d'argent. Ça, plus les primes que je gagnais en enchaînant les promotions (j'étais désormais affectée au service des douanes, mais je préparais assidûment le concours interne pour passer inspectrice), ça nous a permis de faire agrandir la maison. J'ai l'impression que depuis que je suis arrivée à Ruatho, nous ne sommes jamais sortis des plâtres ! L'extérieur n'a jamais été fini, Florian et moi ne sommes pas d'accord sur crépis ou briques, mais l'intérieur a subi de grandes améliorations ! Un grand séjour, une cuisine à part, DEUX salles de bain (grand luxe), notre chambre, la chambre de Robinton qu'il pourra partager avec sa sœur lorsqu'elle sera plus grande et une chambre d'amie qui ne va pas tarder à servir de pouponnière.
Alors que
je vis les deniers jours de ma grossesse dans un calme conjugal relatif, je
m'aperçois avec tristesse du temps qui avance inexorablement. Mon petit bébé
est déjà un petit garçon qui ne va pas tarder à faire son entrée au CP. Il
parle, parle, parle sans arrêt, me racontant tous ses rêves de petit garçon. Et
dieu sait qu'il en a ! Il veut faire tour à tour astronaute, rock star, X-men
(bien que je lui ai expliqué qu'il ne s'agissait que d'un film… il veut à tout
prix un pouvoir spécial et le réclame sans cesse à sa maman… ah, les joies
d'être mère !!).
En ce qui
me concerne, le temps, je l'ai arrêté. J'ai mis des sous de côté, discrètement,
sur un compte personnel (oh, ne critiquez pas, je suis presque sure que Florian
en fait autant… il nous a ramené un jour un jacuzzi Fol'amour, prétextant un
destockage massif, mais je n'ai jamais réussi à trouver la facture dans notre
compte commun), et je me suis acheté une potion rajeunissante. Bon, d'accord,
au début, je n'y croyais pas, je pensais à une arnaque. Mais le fait est qu'à
plus de 30 ans, je parais toujours en avoir 20…
Florian,
lui, n'en profite pas. Je l'ai planqué dans la chambre du bébé, il n'y va
jamais ! Et sur lui, on commence à le sentir, le poids des années. Il était
déjà plus vieux que moi quand je l'ai rencontré, laissez moi vous dire que
c'est une chose qui ne s'arrange pas avec le temps… Finalement, je l'aurai à
l'usure, moi aussi, mon poids mort ! Pourvu qu'il me ramène sa machine à
chocolat avant de claquer, je ne demande pas mieux !
Bonjour
Lessa ! Je vous présente ma petite fille, ma perle, mon ange, mon bonheur,
Lessa ! L'accouchement a été moins pénible que le premier, je me sens à nouveau
en pleine forme. Si ce n'était Florian… Celui-là ! Il s'amuse bien avec mon
cœur ! A peine je lui pardonne et qu'on retrouve un semblant de vie conjugale,
le voilà qui repart dans tout ses travers ! Il n'est venu me voir qu'une seule
fois à la maternité, et manifeste autant d'intérêt pour Lessa qu'il n'en
manifestait pour Robinton, c'est à dire zéro ! Mon dieu, le nombre de fois que
cet homme a manqué me faire tourner en bourrique !
Alors,
forcément, c'est Jacques qui m'a soutenue, qui m'a apporté des fleurs… ça a
bien failli se terminer entre nous, lorsque je lui ai annoncé que j'étais
enceinte de Florian. Il m'en a voulu horriblement, l'idée qu'un autre homme me
touche le révulsait. Mais je lui ai expliqué les circonstances, la difficulté
de faire front toute seule à tous ces problèmes, la famille que nous avions
construite… Il a fini par se faire à l'idée. Et puis je crois qu'il est
secrètement persuadé d'être le père de Lessa. Oh, il ne me l'a pas dit, bien,
sur, mais, certains signe me laissent penser que… sa façon se scruter le visage
de Lessa, pour y retrouver des traits caractéristiques, par exemple… De toute
façon, il a beau scruter, je ne pense pas qu'il y voit quelque chose : la
petite est blonde aux yeux bleus, c'est mon portrait craché !
Aujourd'hui,
j'ai eu une longue discussion avec Robinton. Il est très malin, et s'aperçoit
bien de ce qui se passe entre ses parents. Il grandit et, Florian trouve enfin
un peu d'intérêt à sa progéniture, alors ils discutent pas mal. Florian a
voulut également l'utiliser comme alibi pour cacher ses absences avec ses
amants et maîtresses. Ça, ça m'a mise en colère ! Robinton est resté beaucoup
plus calme, on en a parlé à cœur ouvert car il sait que je n'ignore pas les
tromperies de son père, il m'a dit qu'il avait refusé tout net et qu'il ne
souhaitait pas s'immiscer dans notre vie personnelle. Ça, à mon avis, ça compte
aussi pour moi si jamais me venait l'idée de lui demander avec qui est son
père. Quelle maturité chez cet enfant ! Il faut dire qu'on n'a pas lésiné sur
les jouets éducatifs !!
Il m'a
ensuite longuement interrogée sur mon arrivée ici et sur ma famille, qu'il ne
connaît pas du tout. Il voulait savoir comment j'ai atterri ici. Et devant une
telle maturité, je lui aie tout raconté.
Après ça,
il est resté pensif quelques jours. Il a fini par venir me voir en me disant :
-Dis donc,
maman, lors de ta dernière saisie douanière, il me semble bien que tu as plus
ou moins couvert un gros agent immobilier qui faisait de la contrebande de
costume de mascotte des Lamas.
- Oui, si
on veut. Disons que j'ai été la seule à croire à son innocence, donc j'ai
allégé les charges autant que j'ai pu dans le rapport.
- Moui… Je
pense que ça veut dire que cet homme là te doit un retour d'ascenseur, maman…Et
Robinton me laisse là, pantoise, me demandant comment j'ai fait pour avoir un fils aussi doué…