Les tigresses sont dans l'arène
Comment ça vous pensez qu'après ça, l'harmonie est revenue
dans la maison ?? Tout ça à cause d'un mariage ? Naaaaan, détrompez-vous ! Les
deux tourtereaux sont heureux, mais il n'y a bien qu'eux ! Et on aurait pu
croire que ça s'envenimait les jours suivant lorsqu'on entendit Valentine
commencer à hurler à la mort…
Et bien non, ce n'était pas Brekke qui l'égorgeait, mais bien Valentine qui accouchait. Ni une ni deux, les urgences étaient appelées et une semaine plus tard, nous la voilà de retour avec son petit paquet, sous l'accueil, notez bien, d'une partie de la famille (comment ça où est Brekke ? Ben elle boude, pardi !) et de la jardinière qui a complété l'effectif.
Dans une ambiance détonante, ça c'est sur ! Les deux adolescentes étaient maussades à souhait, Faranth trinquait même ironiquement avec de l'eau. Quant à Mirrim et Alain, ils sont simplement contents de voir un bébé, car ça faisait longtemps.
Et puis de toute façon, la mère, elle a son bébé, ça lui suffit. Hein ? J'ai pas dit le nom ? Ah peut-être… Bref, je vous présente la petite Tellani. Tellani Orlithe, et oui c'est comme ça. Valentine l'a imposé, elle a dit tout net qu'elle n'avait aucun doute sur la paternité, que si quelqu'un en avait, il n'avait qu'à faire des tests génétiques.
Ah tiens, et si je vous donnais des nouvelles des autres
gamins, en attendant ? Souvenez-vous de Faranth qui pataugeait dans l'obtention
de ses bourses ? Et bien nous avons du en arriver aux solutions extrêmes !!
Alors qu'elle arrivait à l'âge auquel soit on fait des études, soit on se
décide à bosser, la demoiselle peinait toujours à avoir sa Blanche du billard,
malgré l'insistance de sa mère… Donc pour éviter qu'elle n'ait gagné toutes ses
bourses précédentes pour rien, et bien on a fait appel à la potion magique de
grand-maman Moreta. Si c'est pas malheureux, ça… son rythme de vie s'est
ensuite limité à : billard – énergiseur- école – boulot – énergiseur- billard…Faut-il
en vouloir…
En même temps, ça n'est pas elle qui en veut tant que ça. Sa mère a beau être en pleine zénitude, elle ne perd pas le nord… Elle continue d'haranguer sa fille pour qu'elle n'oublie pas l'honneur des Orlithe, les privilèges héréditaires, etc., j'en passe et des meilleures. Bien évidement, Faranth étant toujours remontée contre sa mère, ça finit régulièrement en eau de boudin. Elle a presque daigné envisager de parler à Alain (et bien quoi ? elle fait la tête à sa mère, vous ne croyez pas que c'est pour causer à l'homme qui a fait partir son père !) lorsque celui-ci a finit par faire remarquer d'une voix douce à Mirrim qu'elle faisait perdre du temps à Faranth.
Il ne s'est bien sur vu récolter qu'un regard noir de sa
femme et une moue boudeuse de sa belle-fille. Pauvre homme, à mon sens, on ne
l'y reprendra plus…
Sur ce, Faranth était reparti près du billard chercher
quelqu'un avec qui jouer. Ben oui, une bourse, ça ne s'obtient pas en jouant
seul, c'est beaucoup trop facile. Et sa proie régulière en ce moment à ce jeu
là, c'est soit Canth, soit… son père… Et oui, l'ami Paco passe régulièrement à
la maison. D'abord pour voir ses enfants pousser, et ensuite, pour tenter de
parler à Canth qui a une nette tendance à fuir sa présence.
Lui-même pas mauvais en billard, il se retrouve donc souvent
à y jouer avec sa fille, pour qu'elle se perfectionne. C'est également
l'occasion pour eux de discuter, mais comme en ce moment, tout ce que Faranth
peut dire sert à maudire sa mère, il préfère éviter d'entrer dans le conflit.
Comme il lui a dit, il préfère qu'elle se fasse son idée elle-même.
"Faranth, je t'ai déjà demandé, ma puce, mais où est
ton frère ?
-Canth est à son petit boulot, papa.
-Ah. Et il rentre quand ?
-18 h, je te l'ai dit. Mais je t'ai aussi dit qu'il n'a pas
très envie de te voir.
-Je sais ma fille, je sais. Mais ce soir, je reste ici
jusqu'à ce que je l'attrape. Cette situation est devenue pénible, il faut qu'on
parle."
Et ce soir là, Paco l'attrapa. Il maintint sa fille près de
lui au billard car il la soupçonnait d'avertir Canth de sa présence…
"Canth, fiston, je sais que tu n'en as pas envie, mais
il faut qu'on parle.
-Pfff. Quoi ? Tu veux tout le temps qu'on parle, qu'est-ce
que tu as donc de si important à dire ??
-Que je t'aime."
*silence*
"Ah. Je ne sais pas quoi te répondre. Je ne te déteste
pas mais ton départ sans même me dire au revoir m'a beaucoup perturbé…
-Je le sais Canth, je le sais, de la même façon que je sais
que tu ne veux pas vivre avec moi
-Ne reviens pas là-dessus ! l'interrompit Canth.
-Ecoute, je ne comprends pas exactement pourquoi tu veux
rester ici, mais tu as tes raisons et je les respecte. Je venais simplement te
dire, Canth, que nous nous sommes tellement éloignés, trop éloignés !
-C'est toi qui est parti, non ?
-Je sais que j'en porte la responsabilité, n'en doute pas.
Mais j'espère qu'un jour tu comprendras que je ne pouvais plus vivre ici."
Alors qu'il prononçait cette phrase, le visage de Paco se tordait de douleur.
Il reprit cependant :
-Je venait simplement te tendre la main, mon garçon, te dire
que je suis là pour toi si tu le souhaite, et que si jamais tu en ressentais le
besoin, ou simplement l'envie, mon cœur et mon toit seront là pour
t'accueillir.
-Heu…
-Je ne demande pas de réponse à ça, le coupa Paco. Fais-en
ce que tu veux. Je ne dérange pas plus, Canth, je vais rentrer chez moi, en te
demandant de ne pas oublier ce que je viens de te dire.
Sitôt Paco parti, Kylara sauta sur Canth. Elle aussi avait
beaucoup souffert de l'absence de son père et lui avait dit clairement qu'elle
avait besoin de temps pour savoir où elle en était.
"Alors, alors ! Qu'est-ce qu'il t'a dit ??
-De quoi tu te mêles, Kyl' ?
-Roh, tu peux bien me dire ce qu'il te voulait, depuis le
temps qu'il voulait te coincer !"
Canth hésite. Dire à sa sœur que leur père était venu lui
dire qu'il l'aime, à lui, en particulier, ne lui parait pas très gentil pour sa
sœur. Il ignore si son père lui a jamais tenu ce discours.
"Oh, tu sais, il voulait savoir les trucs bateau, quoi
! Vu que je suis un cas à part, il aurait pu s'attendre à ce que j'aille vivre
avec lui, mais voilà, le fait est que je vis ici, et il se demande pourquoi…
-Et tu lui as répondu quoi ???
-Que j'adorais vivre avec une grande sœur qui boude, deux
femmes qui se battent à tout bout de champ, et une petite sœur ultra-curieuse
!" Les derniers mots avaient été prononcés avec le sourire. Kylara
renversa la tête en arrière et rit franchement à l'évocation de leur quotidien.
Kylara se campa bien en face de son frère et se mit bien
droite sur ses jambes. Canth sentait qu'elle avait un truc important à dire et
que ça allait tout sortir d'un coup, comme à l'habitude avec sa petite sœur.
Elle inspira franchement, et sortit d'une traite :
"Etbienmoinonplusjenecomprendspaspourquoiturestesvivreicialorsquetupourraisêtreplusheureuxautrepart
!!!"
Canth sourit. "Prévisible", pensa-t-il.
"Tu veux bien me la refaire moins vite, Kyl', comme
d'hab', j'ai absolument rien compris.
-Je me demandais… pourquoi tu restes vivre ici alors que tu
pourrais être heureux avec Papa ?
-Kyl, ça me regarde, ça. Tu as souffert de son départ, j'en
ai souffert comme toi. Je ne suis pas prêt à tourner la page. Et de plus, qui
défendrai ma peau verte si je m'éloignais des tigresses qui me défendent
??"
Kylara sourit, finalement soulagée. Il n'avait pas répondu,
mais il ne lui en voulait pas de la question, c'est déjà ça de pris. Elle prit
alors le parti de rire elle aussi.
"Les tigresses ? Ben y'a que moi quoi ! Faranth est
trop occupée à bouder maman, maman trop occupée avec son Jules, et les deux
autres, ben, trop occupées à se battre entre elles. Ça devient une maison de
fous, ici ! Vivement la fac !
-Oh pour ça, tu l'as dit petite sœur !"
Oh pour ça, ils ont raison, les gamins ! Pour une maison de
fous, ça en devient une ! Je les appellerais presque les tigresses en furie ! Comment
ça de qui je parle ? De Brekke et Valentine, voyons ! Si vous croyez que la
maternité a adouci les mœurs, vous vous mettez le doigt dans l'œil ! Elles se
détestent ouvertement désormais. Tiens, la dernière bataille en date, laissez
moi vous raconter, c'en est sûrement drôle quand on voit ça de l'extérieur !
Figurez-vous que Brekke, plus que jamais maintenant qu'il y
a de la concurrence (??) à la maison, fait jouer ses charmes auprès de ces
messieurs. Il faut dire qu'elle a de beaux restes, regardez donc le bel éphèbe
qu'elle vient d'attraper dans ses filets.
Après l'avoir baratiné pendant une heure, elle rejoignit la
cuisine pour chercher des rafraîchissements.
Sur qui tombe-t-elle dans la cuisine ? Je vous le donne en
mille, sur Valentine ! Les deux ennemies auto proclamées se regardent en chien
de faïence, et les insultes commencent à fuser :
"Alors, vieille peau, on a trouvé de la chair fraîche ?
Ne vous faîtes pas trop d'illusion, quand même, il ne finira pas dans votre
lit…
-Je ne vois pas pourquoi il ne finirait pas LUI AUSSI dans
mon lit. Ce n'est pas parce que certaines ne sont capables de mettre dans leur
lit qu'un riche héritier pour se faire engrosser que c'est le cas de tout le
monde…
-Humpf, vous faîtes la maligne, mais votre maillot de bain,
malheureusement, ne vous cache pas suffisamment. Il ne reste que parce que vous
lui tenez la jambe en lui postillonnant au visage depuis une heure sans lui
laisser le temps d'en placer une. Faîtes gaffe à votre dentier, si vous
l'échappez à force de jacter comme ça, ça va ruiner l'infime chance que vous
avez peut-être de conclure…"
Comment ça a finit ? Ben vous ne vous en doutez pas ? Les
deux filles se sont sauté à la gorge, bien sûr, histoire de se crêper le
chignon une fois de plus…
Et quand je vous dis une fois de plus, c'est peu de le dire.
Tenez, pour le plaisir, une photo d'une nième bataille, allez savoir la raison,
je ne m'en souviens plus. De toute façon, ces deux-là n'ont même plus besoin de
raison, tout est bon pour se coller une tarte. Quand ça n'est pas l'une qui
recherche sournoisement l'autre dans la maison pour la frapper, c'est l'autre
qui part en chasse, tout aussi sournoisement. Je ne vous raconte pas quand leur
jour de congés est commun et qu'elles se retrouvent seules à la maison. C'est
pas compliqué, c'est un pugilat. Surtout que Valentine cherche aussi, mais elle
n'a pas compris que Brekke faisant une carrière dans le sport depuis de
nombreuses années, et qu'elle est rompue à ce genre d'exercice.
C'est dans cette ambiance particulièrement paisible que Tellani fêta son anniversaire. Ce fut délicat pour tous car en fin de compte, personne n'avait rien contre la petite, c'était la mère que personne n'encadrait… Donc la fête fut mitigée, tout le monde voulait voir la petite et personne la mère, le problème étant que ces deux-là étaient assez proches.
Comme elle l'avait fait pour tous les autres gosses de la maison,
Brekke a prit plaisir à s'occuper de l'éducation de Tellani (mais pourquoi elle
nous a pas fait un petit, celle-là ?!?). En plus, ça lui permettait de
marmonner dans sa barbe toute la journée que si personne d'autre que sa mère ne
s'occupait de la petite, celle-ci finirait mal.
Bon, je vous l'accorde, la Brekke, elle ne pointe son nez
vers Tellani que lorsque Valentine est au boulot. Celle-ci part en recommandant
longuement à la nounou de ne confier sa fille à personne, mais la nounou, si il
y a du monde pour faire son boulot, après tout…
Mais forcément, Valentine a dû un jour tomber sur Brekke qui
s'occupait de Tellani… ou alors c'était Brekke qui a surpris Valentine en train
de recommander à la nounou de ne surtout pas laisser Brekke approcher de
Tellani.
Enfin bref, peu importe, elles continuent à se battre à tout
bout de champ, accessoirement devant la petite, je ne vous cache pas que ça
devient limite pénible.
Cela dit, l'effet positif est que ça a du activer Faranth
qui a ENFIN décollé pour l'université. Après avoir péniblement récolté sa
Blanche du Billard, elle a passé 2 jours à saouler Canth pour danser. Et
encore, on a bien cru qu'elle ne l'aurait pas. L'académise de danse a appelé 2
heures avant son anniversaire pour donner sa réponse positive. Et bien, ces
9500 simflouzes de bourses auront été mérités !
Enfin, parlons cinq minutes d'autres choses, je suis sûre que vous finissez par trouver ça pénible, vous aussi, ces crêpages de chignon !
Après son entretien avec Paco, Canth n'était plus vraiment
dans son assiette. Mirrim, qui avait toujours joué un rôle de maman avec lui,
le sentit. Elle finit donc par, à force de calinneries, savoir ce qui avait
chiffonné Canth.
Ils discutèrent alors un long moment. Elle lui expliqua avec
une franchise touchante la situation dans laquelle son père s'était retrouvé,
et elle finit par dire qu'elle aussi à sa place, serait certainement partie.
Canth l'écouta, il ne questionna que très peu. Il conclut en
la prenant dans ses bras et en lui murmurant à l'oreille combien il avait
apprécié son attention, qu'il avait compris son message, mais qu'il ne savait
pas s'il était prêt à tourner la page.
Mouais. Rien de bien neuf, quoi.
Mirrim fut re-sollicitée dans ce rôle de médiatrice plus
vite qu'elle ne l'aurait cru. Souvenez-vous, je viens de dire qu'on allait
parler d'autre chose 5 minutes, nous revoilà plongées dans le conflit Brekke vs
Valentine. Et c'est Valentine qui est allée trouver la chef de famille,
pour se plaindre de l'attitude de Brekke, tout simplement. D'abord assez estomaquée par cette demande, Mirrim finit par
réagir vivement :
"Dites donc, Valentine, je ne vous avais pas dit,
lorsque vous avez emménagé, que la vie ici ne serait pas facile tous les jours,
à vous imposer comme ça ??!!
-Ce n'est pas la question ! Le fait est que je vis avec vous
et que ça en devient insupportable !"
Le visage de Mirrim se ferma.
"C'en est trop, Valentine, vous vous moquez de moi !
Vous ne pensez quand même pas que je vais prendre votre défense, après votre
intrusion dans notre famille ? Ça n'est pas parce que moi je tolère votre présence
ici que je vais lever le petit doigt pour que Brekke en fasse autant !
-Mais enfin, je vous rappelle que le testament de Marc
imposait certaines conditions de vie ! Vous ne vous rendez pas compte de
l'enfer dans lequel Tellani et moi vivons.
-Valentine, écoutez moi bien. Et d'une, Tellani ne vit aucun
enfer, tout le monde ici s'occupe d'elle du mieux qu'il peut. Et de deux, Marc
a effectivement laissé des disposition testamentaires vous concernant, mais
dans "conditions de vie", elles évoquent le gîte et le couvert. Ce
que vous avez, avec en prime le blanchiment. Je vous prie donc de sortir de mon
bureau dans lequel vous n'avez rien à faire, et de ne pas renouveler ces doléances
idiotes auxquelles je n'ai de toute façon aucune envie de répondre. Débrouillez-vous
donc seule avec Brekke."
Le ton de Mirrim ne laissait aucune place à la discussion.
La tête basse, Valentine ressortit du bureau pour, qui sait, de reprendre une
nième rouste…
Péniblement, les jours passèrent. Faranth était tranquillement à la fac et donnait aussi peu de nouvelles d'elle que possible. Kylara et Canth bossaient pour partir le plus vite possible à la fac pour sortir de l'ambiance étouffante de la maison.
Et Tellani continuait de pousser. On venait de célébrer récemment son anniversaire, il semble que les promesses faites lors de sa petite enfance se tiennent alors qu'elle grandit. Je me demande ce qu'elle deviendra adolescente.
Notez bien, c'est assez fascinant, elle a exactement les mêmes
yeux que mon cher Jacques. Sebell les avaient également, ainsi qu'Alain et Marc.
Ah, génétique, quand tu nous tient !!